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36. Il est venu, le temps des moissons.

Publié le 19 février 2015 dans Vie quotidienne à la Vallée de Joux

Le temps des orges mûres par Suzy Audemars.

    Les moissons à la Vallée de Joux, mis à part quelques tentatives occasionnelles que l'on fait plus pour les subsides qui en découlent que pour une forte productivité, font partie désormais du passé. Et pourtant ce fut-là autrefois une tâche agricole des plus importantes, puisqu'elle permettait seule, alors que les pommes de terre n'étaient pas encore cultivées et que le produit des jardins était très limité, d'avoir du blé à moudre! Ou plutôt de l'orge, du seigle ou encore de l'avoine. 
    On fauchait les céréales, on les mettait probablement aussi en "moyettes" ainsi que l'on procédait en plaine, puis l'on battait devant les granges. Au moyen du fléau, outil que l'on retrouve parfois encore au fond des vieilles fermes. C'était là une opération que l'on menait à plusieurs tout en devant adopter un rythme précis, sous peine de s'assommer mutuellement! 
    Et le grain ainsi obtenu, on le mettait dans ces grands sacs de jute, remplis ils pesaient autant que du plomb, puis qu'on allait vider dans l'arche que possédait chaque maison. A trois casiers en général, soit un pour chaque sorte de grain. Et c'est dans l'arche que l'on venait puiser le grain, qu'il fallait ensuite moudre etc... 
    L'arche était indispensable, en ce sens que le grain resté dans les sacs aurait invariablement été attaqué par les souris, qui ne se gênaient pas non plus parfois pour pénétrer par un trou quelconque du meuble rustique. Certaines arches étaient munies d'une serrure, preuve que les céréales, c'était précieux. Et Ô combien. Puisque sans elles, on mourrait de faim. 
   Tout cela nous rappelant les tragiques disettes de la fin du XVIIe siècle, où nos compatriotes ne furent pas loin de mourir de faim. Et s'ils ne le firent pas, ce ne fut que grâce à l'apport des récoltes de plaine qu'il fallut pourtant payer le grand prix. D'où endettement d'une partie de la population, créances contactées vis-à-vis de sa seigneurie Villadin et qui allaient peser pendant pas loin d'un bon tiers de siècle sur le mode de vie de ces pauvres diables de Combiers. Certains durent vendre leurs biens. 
    Tout cela prouvant qu'il vaut la peine de s'attarder sur cette partie de notre histoire, longue, méconnue et désormais oubliée. C'est qu'on a autre chose à faire, pense-t-on!