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34. Le cas Paul d'Aubonne, en 1728, par comparaison.

Publié le 08 avril 2014 dans Le procès du Risoud, dit Grand Procès (1758-1762)

Le Risoud, encore... toujours!

    Il sera vain, dans le cadre de toutes les affaires litigieuses concernant les forêts de la Vallée, de revenir en arrière et de tenter de savoir qui avait raison, ou tort, au contraire. 
    Reconnaissons la situation. La forêt longtemps n'intéressa personne. Ou plutôt elle était si dense que l'on pouvait y piocher à loisir sans qu'il n'y ait aucune conséquence. On la considéra même, et quoiqu'elle était profondément utile à toute la population, comme une ennemie, en ce sens qu'elle occupait la place que l'on pourrait utiliser pour des cultures, plus tard pour des pâturages. Ce fut alors la grande destruction par tous les moyens possibles: par l'abattage, par les cernissements, et même parfois par l'incendie. On gagna de l'espace pour le bétail, on diminua de manière drastique le volume total des forêts, ainsi que cela se passe aujourd'hui encore en nombre de pays de notre planète et qui condura forcément au même constat: la forêt manque, l'homme est menacé. 
    C'est alors qu'ici l'on prit enfin conscience de ce phénomène: la forêt va disparaître, l'homme ne pourra pas y survivre. Intervinrent les droits de bochérages, qui, s'ils accordaient toujours l'autorisation aux habitants de se servir en forêt, procédaient d'une réglementation. Et celle-ci de plus en plus stricte au fur et à mesure du développement de la population. 
    On l'a vu, en des temps anciens, la forêt n'intéressait personne. Alors régnaient sur l'extrémidé sud ouest de la Vallée, établis là depuis plusieurs siècles, des communes de plaine. Leur implantation sur le territoire que l'on nomme combier depuis quelques siècles, était importante. La concurrence entre ces communes et celles de la Vallée intervint au début du XVIe siècle, alors que la population du Chenit commençait à se multiplier. Un acte essentiel, de 1543, vint opérer une sorte de partage, le Lieu à occident, les communes de plaine, par l'intermédiaire de deux de celles-ci, à orient. 
    Le réglement put subsister en tout son contenu pendant plus d'un siècle. Il arriva cependant qu'avec le développement toujours plus important de la commune du Chenit en même temps que des deux autres communes de la Vallée, on en vint à considérer la présence de ces communes de plaine gênante. Non pas par l'utilisation des pâturages, mais surtout par celle des forêts. Tandis que jadis chacun pouvait y puiser autant qu'il le voulait sans gêner personne, désormais on en vint à voir l'exploitation des futaies  par ces communes de plaine comme un crime de lèse-majesté. Elles étaient au même niveau, on les relégua à un niveau secondaire, les droits pour les seuls habitants de la contrée. 
    C'était en quelque sorte forcer la main du droit le plus élémentaire. Et pour le faire on s'appuyait sur des droits anciens que l'on interprêtait entièrement en faveur des communes combières. On s'attardait surtout sur l'acte de 1344 ou soi-disant François de la Sarraz, tout en vendant la Vallée à Louis de Savoie, réservait le droit d'usage dans les forêts pour les habitants. Les Combiers se voyaient ici cités. Or ce n'était très certainement pas le cas. A l'époque, la population laïque de la Vallée était insignifiante tandis que les villages de plaine étaient déjà très développés. Par population, le baron de la Sarraz, savait-il même que des habitants habitaient la Vallée, entendait toute la population ressortissante de son territoire, et non pas seulement celle qui aurait existé en une situation périphérique. Or nos Combiers, ici, ramènent entièrement la couverture à eux. Situation qui a été acceptée comme réelle et logique par la plupart des historiens. 
    Ce droit d'usage en faveur de la population dont on réclamait la propriété à grands cris lors du procès du Risoud, auraient même pu avoir des conséquences redoutables si l'on peut comprendre que toute la population du ressort de la baronnie de la Sarraz auraient pu se servir dans les forêts de la Vallée. Diverses tentatives allant dans ce sens furent tentées. Les Combiers, persuadés de leur bon droit inaliénable, alors qu'il ne l'était pas, surent toujours non seulement résister, mais aussi convaincre. On peut dire que dans ce sens-là, ils surent tirer leur épingle du jeu. Ils partaient donc confiant dans un procès qui allaient leur coûter un sacré saladier. Ils gagnèrent le premier round, ils perdirent le second, le plus important. 
    Ne leur restait donc plus qu'à pleurer. Malgré tout, au contraire de ce qu'ils pensaient, ils jouirent toujours du Risoud d'une manière ou d'une autre, et surtout, ils ne furent pas obligé de s'exiler ainsi qu'ils l'avaient prédit au coeur de la tempête!    
     Reconnaissons ici que l'arrivée de l'industrie lapidaire, puis celle de l'horlogerie, sauvèrent les meubles de la plus belle des manières.